J’ai commencé à faire de la photographie par hasard, à la suite d’une rencontre avec un grand reporter, il y a plus de trente ans. J’étais en voyage dans le sud de la Tunisie. Lui travaillait sur les tribus nomades. C’est en parcourant le monde et en le regardant faire, que j’ai appris à prendre des photos. Mais je crois que le plus important c’est que j’ai aimé cette vie : voyager pour faire des photos, et inversement. C’était instinctif, pas grand chose à voir avec un choix prémédité.
Et puis, j’avais une image nichée au fond de ma tête depuis l’enfance : Alexandra David Néel. Finalement, j’ai suivi mon rêve d’exploratrice en voulant marcher sur ses pas : partir à la découverte du monde, aller là où personne ne va, à la rencontre des gens là où ils se trouvent, même (et surtout !) s’ils sont loin. C’est la part d’inaccessible qui m’attire. Je me sens aspirée par l’inconnu, par ce qui est retiré ou en retrait, poussée par le désir de m’immerger pour comprendre et rendre compte.
Ce que je veux faire avant tout c’est témoigner. C’est-à-dire capter, grâce à l’appareil photographique, la réalité du monde. Rendre visible l’existence des choses et des objets, fixer la force d’un paysage, attraper une expression, un geste, la lumière intérieure des êtres. La photographie c’est d’abord un enregistrement du monde tel qu’il est. C’est un moyen de donner à voir cette altérité, présence réelle parfois étrange, si extérieure à soi et qui fait pourtant partie de nous.
Une photo raconte une histoire. C’est un regard. Derrière l’objectif et face à une image qui va devenir une photo – celle que j’ai choisi de garder – il y a ma façon de voir les choses et de les percevoir. Mais c’est une histoire partagée, ou plutôt faite à plusieurs, avec tout ce qui se trouve de l’autre côté de l’objectif. C’est le résultat d’un échange, un peu comme une réaction chimique.
Le hors-champ de mes photos, c’est la relation que je tisse avec les gens et l’environnement extérieur – qu’ils soient dans le cadre ou pas. Le lien qui me tient à tout ce qui participe à la prise de vue. L’appareil photographique ne doit pas être un paravent. Quand je suis derrière, ou quand je le porte avec moi, c’est lui qui me met en contact avec l’autre et le monde. Je ne me cache pas derrière mon appareil.
Le parcours d’Aline est une succession de rencontres. C’est un anthropologue italien qui la met sur le chemin de son premier reportage : les indiens Athapaskan à Anvik, un village de 110 habitants au bord du fleuve Yukon en Alaska en 1983. Elle y reste trois semaines. Les rencontres entrainant les sujets de reportage, elle retourne treize fois en Alaska, ce qui lui permettra d’éditer son premier livre sur la célèbre course de traineaux à chiens, l’Iditarod, en 1994.
Après avoir passé un an en Australie, elle fait la couverture du magazine Grands Reportages avec une série de photos sur les pêcheurs de perles de Broome dans le Nord-Ouest australien. Cette étape clé lui permet de collaborer à de nombreux magazines (féminin, tourisme, cuisine & gastronomie…) et d’être photographe-reporter pendant vingt cinq ans.
Posant enfin ses valises à Lyon, Aline devient photographe de studio tout en arpentant la région. Elle continue à faire des reportages, toujours avec le même objectif : rencontrer, découvrir, connaître et faire connaître. Son premier livre de cuisine sur les épices et aromates lui permet de poser son regard sur la gastronomie et de rencontrer les grands chefs de la région Rhône Alpes (Christian Têtedoie, Paul Bocuse, Christian Lherm, Jean Sulpice…).
Plusieurs recueils de ses photos sont édités, notamment Sur un fil qui rassemble ses images sur les étendages à travers le monde. Elle contribue à l’édition de nombreux livres sur les chalets, la récup, la cuisine…
Aline réalise plusieurs expositions de photos, notamment Sur un fil aux Docs de Marseille et à la Maison des photographes à Paris. Elle participe à des expositions collectives comme Architecture dans l’objectif – Traversées, où elle présente sa série sur les ponts de Lyon à La Sucrière, en septembre 2014.